comment était organisée la société avant la révolution française (partie 3 : 3/4)

par - avril 18, 2023

    Il nous faut continuer notre exploration sociologique du Tiers Etat. Les différentes catégories bourgeoises ont été observées lors de la sous-partie précédente et nous avions commencé à entrevoir fugitivement la condition des artisans paupérisés, qui se situent en quelque sorte à la lisière des classes populaires.
    Observons désormais ceux que Victor Hugo, dans Les voix intérieures, appelait la cariatide, la grande masse laborieuse du Tiers Etat. Dans cette troisième sous-partie, c'est du prolétariat urbain dont nous aurons à nous occuper. Enfin, la quatrième et dernière sous-partie sera dédiée au monde paysan. On a parlé, pour désigner les classes populaires urbaines et campagnardes, de quatrième état ou de Quart-Etat, comme le nom du célèbre tableau du peintre italien Giuseppe Pellizza Volpedo de 1901, qui montre une masse de prolétaires en train d'avancer.

Les classes populaires urbaines

    Il est question ici d’individus qui ne possèdent, pour l’immense majorité d’entre eux, que leur force de travail pour vivre. Ils préfigurent en quelque sorte le prolétaire du XIXe siècle dont parle Marx d’un bout à l’autre de son œuvre. Dans les villes d’Ancien Régime, nombreux sont ceux qui appartiennent à cette catégorie. Elle se déploie en une myriade de conditions et d’activités qui confinent toutes à la pauvreté sinon à la misère. Les possédants bourgeois et aristocrates nommaient ces individus qui travaillaient de leurs bras par le terme dégradant de “peuple”. Pourtant, le destin de ces classes populaires urbaines sera lié à celui de la bourgeoisie révolutionnaire, en raison de leur opposition commune au système des privilèges d’Ancien Régime. Il faut d'ailleurs signaler que si tous les membres du Tiers payent les impôts et les nobles non, les classes populaires ainsi que la toute petite bourgeoisie artisanale qui en est fort proche, elles, en payent plus que les grands bourgeois. C’est-à-dire qu’il y a la roture dorée et la roture tout court et c’est à cette dernière, celle-là même qui possède le moins, que l’on intime de payer la plus grande part. Il y a par exemple le paiement de la capitation, impôt royal prélevé en monnaie sur chaque adulte non privilégié, indépendamment de ses revenus ou de son patrimoine. Albert Soboul montre les différences qui existent, suivant les endroits, dans l’établissement des cotations fiscales relatives à cette capitation. Ces cotations étaient en somme l'établissement par l'Etat, province par province, des montants exigés individuellement à chaque contribuable. A Grenoble, en 1707, la haute bourgeoisie n’était représentée que par 37 cotes sur les registres de capitation, tandis que la petite bourgeoisie (terme imprécis renvoyant ici surtout aux petits artisans et petits boutiquiers), elle, par 752. Toujours dans la même ville mais désormais en 1773, sur un total de 1279 cotes concernant la bourgeoisie, 845 relèvent de la petite. Alors, une minorité de grands bourgeois entendait payait moins d’impôts que les autres roturiers¹.
    Pour autant, nous verrons le moment venu que si les classes populaires se sont dressées jusqu’au bout contre l’aristocratie, les attitudes émanant de ses membres ont été diverses et même évolutives, à preuve le fait qu’ils furent liés aux fractions bourgeoises qui prirent successivement et momentanément la tête du mouvement révolutionnaire. Nous avions précisé lors de la sous-partie précédente qu’il était difficile de tracer nettement les lignes de démarcation entre la petite bourgeoisie artisanale en voie de paupérisation et les classes populaires proprement dites. Albert Soboul parlait de ces multiples “transitions insensibles” qui menaient de l’une à l’autre de ces catégories². Regardons-y de plus près en distinguant celles-ci.

L’artisanat dépendant

    Nous avions terminé la sous-partie précédente par ces artisans appauvris devenus salariés. Ces individus se placent à l’extrême limite des classes populaires et de la petite bourgeoisie. Les artisans de la soie, les canuts lyonnais dont nous avons parlé, entrent typiquement dans cette catégorie. Ils ont été réduits au rang de salariés, à la solde de marchands capitalistes qui leur fournissent les matières premières, accaparent le produit fini et le commercialisent, se réservant ainsi l’intégralité du profit. L’artisan travaille chez lui, hors de la surveillance du maître marchand. Il dispose de son propre outillage qu'il doit mobiliser à ses propres frais. Pour le dire autrement, l’usure de ses instruments n’est pas comptée dans le salaire - sous forme d’amortissement - versé par le capitaliste. Parfois, l’artisan engage des compagnons et en cela il fait figure de petit patron. Pour autant, économiquement, socialement, il est un salarié sous la domination du capitaliste marchand qui représente désormais à ses yeux le seul dispensateur d’ouvrage possible. Cette structure de dépendance dans laquelle sont tombés les artisans, les maigres revenus qui leur sont alloués par le capitaliste sous la forme du tarif, donnent parfois lieu à des conflits ouverts. Les canuts lyonnais, dont les révoltes au XIXe siècle seront célèbres, se soulèvent déjà en 1744, puis en 1786. Il avait fallu déployer l’armée afin de rétablir l’ordre. Les canuts réclamaient une réglementation des rapports économiques de travail et d’échange. Les sans-culottes durant la Révolution, nous le verrons, avanceront de telles revendications.
    Outre ces artisans paupérisés, il existe déjà, à la fin du XVIIIe siècle, toute une légion d’ouvriers - certes beaucoup moins importante qu’au XIXe siècle - éparpillée au gré de la production artisanale, tels les compagnons et apprentis, sinon concentrée dans les complexes manufacturiers, industriels et ailleurs.

Compagnons & apprentis

    Les compagnons et apprentis sont intégrés au système des corporations. En cela, ils demeurent sous l’étroite dépendance économique et idéologique des maîtres-artisans. Dans la plupart des métiers, l’atelier se confondait souvent avec le domicile même du maître, de sorte que l’atelier familial constituait, pour ainsi dire, une cellule économique autonome et autocéphale de production. Cette particularité engendrait toute une série de rapports sociaux entre les membres de la même cellule. Les compagnons et apprentis étaient généralement un ou deux et ils vivaient sous le toit du maître et étaient nourris par lui. Ils étaient donc sous sa domination économique et morale. Cet usage était encore en vigueur à la veille de 1789, mais il tendait de plus en plus à reculer, au profit d’une séparation des maîtres et de leurs compagnons. Cette évolution signifiait le début d’une progressive dislocation du monde traditionnel du travail, et elle se traduisait par l’augmentation du nombre de compagnons qui pouvaient du reste de moins en moins de accéder au grade de maître.
    Lorsque le système de domination était décidément trop asphyxiant, des révoltes avaient lieu. La première forme de grève de toute l’histoire française remonte au XVIe siècle et elle fut le fait de compagnons. En 1539, les compagnons imprimeurs de Lyon se sont insurgés contre les maîtres. Cet événement matriciel est connu sous le nom de Grand Tric (tric viendrait peut-être du terme allemand streik qui voudrait dire “grève”). Les compagnons imprimeurs s’insurgèrent contre la longueur du temps de travail - ils peinaient en moyenne jusqu’à 12 heures par jour dans des ateliers exigus - et contre l’emploi abusif d’apprentis de la part des maîtres, stratégie patronale ayant pour effet de faire pression sur les salaires des compagnons car les apprentis étaient moins bien payés. Il était également reproché aux maîtres la mauvaise qualité de la nourriture qu’ils prodiguaient aux compagnons. Scénario qui se répétera d’innombrables fois dans l’Histoire, les compagnons ont été réprimés en 1542 et interdiction leur a été faite de s’associer, c'est-à-dire, pour employer un terme courant de nos jours, se syndiquer.

Ouvriers des manufactures

    Ils sont de plus en plus nombreux tout au long de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Il suffit de se reporter aux chiffres donnés dans la sous-partie précédente. Nous avions vu par exemple que la Compagnie des mines d’Anzin concentrait jusqu’à 4000 ouvriers. L’usine de Niederbronn appartenant au baron Dietrich comptait 800 ouvriers. Beaucoup plus nombreux étaient ceux qui étaient disséminés dans les ateliers urbains et ruraux vers Lyon ou encore Sedan. La manufacture Poupart de Neuflize faisait travailler jusqu’à 14 000 ouvriers sur plusieurs lieux épars, combinant travail en atelier et travail à domicile.
    Les ouvriers des manufactures, dont la plupart étaient sans qualification, étaient durement soumis à la discipline des ateliers, dont l’âpreté n’était pas sans rappeler les conditions extrêmes dans lesquelles travaillaient les ouvriers des chantiers navals de Hollande au début du XVIIe siècle. Dans les manufactures rurales, les ouvriers - qui étaient des paysans travaillant pour se constituer un salaire d’appoint lors des moments d’inactivité agricole - avaient un faible salaire, inférieur même à ce qu’Adam Smith appelait le salaire naturel, c’est-à-dire le salaire minimum nécessaire à la reproduction de la force de travail de l’ouvrier et au maintien en vie de sa famille. Il était d’environ 4 à 5 sous pour les fileuses, peut-être 8 à 10 sous pour les tisserands. Il était plus aisé dans les campagnes de prodiguer de si bas salaires, car le système des corporations n’y était pas en vigueur comme dans les villes. Du reste, en 1762, le pouvoir royal avait accordé la liberté intégrale du travail dans les campagnes, ce qui veut dire que les ouvriers étaient entièrement à la merci des capitalistes. Il était également très difficile aux ouvriers des manufactures de changer d’employeur, car il leur fallait un congé rédigé par écrit émanant du patron, pratique qui correspondrait de nos jours à la rupture conventionnelle, mais sans indemnisation de chômage dans le cas des travailleurs d’Ancien Régime. Ceux-ci ne pouvaient tout simplement pas démissionner sans le consentement du maître. Ils étaient pour ainsi dire enchaînés à son bon vouloir. En 1781, l’Etat royal rendit obligatoire le livret de travail à tous les salariés, pratique qui se consolidera véritablement durant la période napoléonienne. Le système du livret de travail est coercitif et témoigne d’une réglementation du travail particulièrement dure aux ouvriers. Ces derniers ont obligation de garder ce livret par devers eux. Il leur est donné par l’employeur et ils ne peuvent changer d’emploi que si le patron y consent. En cas de refus de la part de ce dernier, ils ne peuvent pas trouver un autre travail. Du reste, si l’ouvrier venait à avoir des dettes ou des amendes de pénalité, le patron pouvait garder son livret. Le livret de travail avait pour but de lutter contre le nomadisme et le vagabondage, mais également de "dresser" anthropologiquement l'individu à la discipline du travail manufacturier et industriel.

Salariat de clientèle & surpopulation

    C'est le groupe numériquement le plus important des classes populaires urbaines. Ce sont les petits gagne-deniers qui servent aux commissions et aux menus travaux. Ils sont légion à Paris et dans les grandes villes. Il y a les journaliers qui se proposent sur les marchés, dans les ports, partout où il est possible de gagner quelque argent à la journée. Il y a les jardiniers, il y a aussi les commissionnaires, notamment ceux qui courent à travers la ville pour faire les courses ou transmettre les messages pour ceux qui les emploient. Il existe également les porteurs d’eau et les porteurs de bois. Il faut compter dans cette catégorie corvéable que l'on paye au lance-pierre toute la domesticité de l’aristocratie et de la bourgeoisie : les valets, les cuisiniers, les cochers… On retrouve tout ce personnel composite vivant de revenus minimum - voire insuffisants parfois pour pouvoir vivre - amassé dans certains quartiers populaires. Il y a particulièrement trois faubourgs parisiens, dont l’importance sera très grande durant la révolution : Saint-Antoine, Saint-Marcel et Saint-Germain. S’entassent également dans les villes les ruraux qui viennent y travailler durant les saisons froides, tels les paysans du Limousin qui gagnent Paris tous les ans pour besogner dans le bâtiment de l’automne au printemps.
    Lors des années de mauvaises récoltes, les villes sont encombrées de vagabonds, d’artisans ruraux ruinés et de journaliers agricoles, qu’on appelle également les brassiers, en cela qu'ils n’ont que leurs bras à proposer pour gagner de quoi vivre. C'est la cohorte des démunis déferlant dans la Cité pour tenter de trouver du travail ou quelque secours miraculeux. Ils sont les vaincus d'un édifice social par essence inégalitaire, aggravé à l'extrême en raison de la crise et de la cherté. Marx, abordant les problèmes de l'accumulation et de la surpopulation au chapitre XXV du premier livre du Capital, évoque ces pauvres miséreux embourbés dans la fange et “l’enfer du paupérisme.³” Durant les grandes journées révolutionnaires, ces damnés de la terre constitueront à l’occasion un personnel éventuellement disponible pour les émeutes.
    Toutes ces catégories que l’on vient de présenter vivent, à des degrés divers, la même condition. Au XVIIIe siècle, le sort des classes populaires urbaines tend progressivement à s’aggraver, en raison d’une augmentation continue de la population des villes, conjuguée avec la montée inexorable des prix (nous avons parlé en première partie du phénomène de l’inflation de longue durée du XVIIIe siècle). La populace des villes subit donc un permanent déséquilibre des salaires par rapport au coût de la vie.

Les classes populaires & le problème de l’enchérissement des choses

    Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, les catégories salariées tendent progressivement vers la paupérisation. A preuve, entre 1771 et 1789, l'augmentation à Riom (commune proche de Clermont-Ferrand) du nombre d’enfermements de journaliers et d’artisans, qui font suite à des condamnations judiciaires pour mendicité.
Sur le graphique ci-dessus, on voit l'augmentation progressive de l’emprisonnement des artisans mis au chômage en raison de la crise. Durant toute la période 1771-1789, ils sont inférieurs en nombre - très nettement durant les années 1771-1777 - par rapport aux journaliers et chômeurs (catégorie comprenant aussi les vagabonds), mais l'évolution générale est qu'ils tendent de plus en plus à les égaler - tandis que la part des brassiers et chômeurs, quant à elle, diminue progressivement - et même, à les dépasser légèrement dans la toute fin de la période, en 1789. A mesure que se succèdent les crises de subsistance, phénomène que nous allons observer d’un peu plus près à la suite, l’artisanat - comme toutes les catégories salariées du reste - subit durement le contrecoup de la hausse du coût de la vie. La progression de la mendicité se voyait également à travers l’augmentation du nombre de vagabonds. Déjà du temps du règne de Louis XIV, Vauban les estimait comme représentant environ 10% de la population du royaume. En Basse-Auvergne, la mendicité et le vagabondage sont des phénomènes qui progressent significativement à la fin du XVIIIe siècle. Durant l’année 1781, les autorités locales ont enregistré 120 arrestations de vagabonds et mendiants, et il ne s’agit là que des personnes arrêtées, ce qui signifie qu’il en existait bien d’autres. En 1782, on a procédé à 155 arrestations et à 320 expulsions. L’année suivante, il y eut 250 âmes errantes privées de liberté par les autorités. Il est intéressant de constater que l’augmentation de ces arrestations de vagabonds suit l’évolution des prix des grains : à mesure qu'ils montent, le nombre d’individus expropriés ou mis en chômage, lui aussi, augmente. Grossissent alors les rangs des mendiants et des vagabonds, d’où une hausse des arrestations en un temps où le vagabondage et l’absence d’activité professionnelle étaient sévèrement réprimés. On a parlé, pour qualifier cette dynamique claustrale, de “renfermement des pauvres”. Conjointement à cette augmentation du nombre de vagabonds et de chômeurs enfermés, on assiste à une hausse du nombre d’enfants placés dans les orphelinats. Ce phénomène comprend également bien d’autres causes, notamment le fait qu’il n’existait pas de contraception et que dans les familles pauvres trop d’enfants n’était parfois guère une option envisageable.
    La journée de travail de la plupart de ces catégories laborieuses que nous venons de présenter est fort longue, allant généralement de l’aube au crépuscule. Durant la belle saison, dans les ateliers de Versailles, les ouvriers travaillent de 4 heures du matin à 20 heures. A Paris, dans la plupart des métiers, on travaille en moyenne 16 heures par jour. Les relieurs et les imprimeurs, eux, font 14 heures et pour cela ils sont presque considérés comme des privilégiés. Bien entendu, le travail au XVIIIe siècle est moins intense que celui des ouvriers rivés aux chaînes de montage taylorisées des usines automobiles du XXe siècle, et, de plus, les fêtes chômées sont nombreuses (81 jours d’inactivité dans l’année). Cependant, les jours fériés signifiaient également l’absence de travail et donc, fatalement, l’absence de paye.

Le cycle de la crise de longue durée
& le problème des prix et des revenus


    Le problème le plus urgent des classes populaires au XVIIIe siècle n’est pas tellement celui du temps de travail, il est surtout celui du salaire réel, c’est-à-dire exprimé en pouvoir d’achat. Tout au long du siècle, nous l’avons vu à plusieurs reprises, la France connaît un phénomène d’inflation de longue durée qui comprend des variations cycliques - variations que nous expliquerons en détail dans un prochain article dédié à la crise d’Ancien Régime. La hausse des prix atteint les différentes catégories de la population urbaine, mais diversement suivant la constitution de leur budget et le niveau de leur salaire. Les céréales, élément crucial de l’alimentation des hommes de l’époque en cela qu’ils se nourrissent essentiellement de pain, augmente plus que tout le reste. Le peuple est donc lourdement pénalisé par l’inflation. A ce phénomène d’enchérissement de la vie s’ajoute celui de la pression démographique : tout au long du XVIIIe siècle, la population française ne fait que croître. Avec la multiplication des hommes, la valeur des marchandises augmente sans cesse et l’on assiste à un accroissement des sous-alimentés. Le pain, voilà le problème n°1 de la société d’Ancien Régime.
    Pour fixer un indice du coût de la vie des classes populaires, il faut tenter de déterminer la proportion des diverses catégories de dépense opérées par elles. Ernest Labrousse, sans conteste l’un des historiens les plus importants de tout le XXe siècle, a réalisé dans les années 1930 un travail colossal et inégalé à ce jour sur l’évolution des prix et des revenus dans la France du XVIIIe siècle, et il est parvenu à dégager, via l’établissement de nombreuses séries statistiques, des chiffres qui sont encore aujourd’hui d’une précieuse utilité pour la recherche historique. Pour le XVIIIe siècle, le pain représente à lui seul près de la moitié du revenu populaire et il s’agit là, approximativement, d’un minimum. Un salarié urbain dépensait donc environ :
  • 50% de son budget à la consommation quotidienne de pain;
  • environ 16% pour les légumes, le lard et le vin;
  • 15% pour les vêtements;
  • 5% pour le chauffage et
  • peut-être 1% pour l’éclairage.
    En appliquant les indices de longue durée au prix de chacun de ces différents articles de consommation courante, Labrousse conclut que, par rapport à la période de base 1726-1741, le coût de la vie a augmenté de 45% au cours du cycle 1771-1789, et de 62% au cours des seules années 1785-1789 . Labrousse, du reste, qualifie ces années 1785-1789 de “cycle extrême” en raison de la gravité de la crise qu’elles renferment : c’est le moment le plus prononcé de la crise de longue durée de tout le XVIIIe siècle. Il est intéressant de voir que ce cycle extrême dure jusqu’à la révolution et ses effets, nous le verrons plus tard, s’étendent même au-delà. Assurément, à la veille de la révolution, les classes populaires subissent de plein fouet une crise économique de grande ampleur. Une preuve de cela réside dans le fait qu’au seuil de l’année 1789, la part du pain dans le budget populaire constitue désormais 58% par suite de la hausse générale des prix; et durant l’année 1789 elle-même, cette part fut portée à 88% : il ne restait donc plus aux ménages populaires que 12% de leur revenu pour les autres dépenses. Il s’agit donc, ni plus ni moins, dit Labrousse, d’un “effondrement du salaire exprimé en biens de consommation.” Labrousse a même dévoilé un fait des plus intéressants sur lequel nous aurons à revenir : le 14 juillet 1789, le fameux jour de la prise de la Bastille par le peuple parisien en arme, le prix du pain avait atteint son apogée séculaire, ce qui ne peut être perçu comme une simple coïncidence.
    La hausse des prix, si elle ménageait les classes aisées, accablait d’autant plus les pauvres. Vauban estimait déjà, vers la fin du règne de Louis XIV, le salaire moyen à 15 sous. Celui-ci va demeurer à peu près stable jusque vers le milieu du XVIIIe siècle. Une enquête de 1777 évalue le salaire moyen à 17 sous, et on pense qu’il a évolué, en 1789, jusqu'à 20 sous. La miche de pain (qui pèse environ 1 kilo), elle, coûtait 2 sous dans les années de bonne récolte. Cela veut donc dire que le pouvoir d’achat quotidien des ouvriers exprimé en quantités de pain représente, vers la fin d’Ancien Régime, 10 miches de pain, ce qui n’est pas beaucoup car les adultes du ménage consomment journellement 4 à 5 miches de pain, si ce n’est plus, sans compter les enfants ni les autres dépenses à effectuer. Or, en temps de crise, le prix des céréales augmente et donc, mécaniquement, celui du pain dépasse très largement ces 2 sous : durant les années 1788-1789 (moment de combustion du cycle de crise 1785-1789), la miche de pain excède les 10 sous et monte parfois au-delà des 13 sous, voire plus. Par conséquent, un ouvrier, qui gagne ses 20 sous lors des jours non chômés, n’a pas de quoi s’acheter plus d’une miche de pain, ce qui est tout à fait insuffisant pour lui et sa famille et condamne celle-ci à la sous-alimentation; il ne lui reste quasiment rien pour le reste. 

    Il faut désormais tenter de déterminer si le mouvement des salaires a redressé ou non l’incidence de la hausse des prix sur le coût de la vie des classes populaires, ou, au contraire, s’il l’a davantage aggravé. Labrousse, en partant toujours de la période de base 1726-1741, a établi des séries statistiques qui montrent une augmentation, pour la période 1771-1789, des salaires réels des ouvriers s’élevant à 17%. Dans près de la moitié des cas, les séries locales de Labrousse montrent que cette hausse des salaires n’atteint même pas 11%, tandis que par rapport à ces mêmes années 1775-1789, la hausse des prix, elle, est de 22%; et elle dépasse les 26% dans trois provinces. La hausse des salaires est donc insuffisante, et elle varie du reste selon les professions :
  • les ouvriers du bâtiment : 17% pour la période 1771-1789 et 24% pour 1785-1789;
  • les journaliers agricoles : 12% pour 1771-1789 et 16% pour 1785-1789;
  • les ouvriers du textile, eux, connaissent une augmentation salariale se tenant à mi-chemin de ces chiffres. 
    La hausse de longue durée des salaires, qui n’excède nulle part les 26% , est donc très faible par rapport à celle des prix, qui oscille entre 48 et 65% ! Les salaires ont suivi les prix mais sans jamais les rattraper. Labrousse dresse ce terrible constat commun à toutes les catégories salariées : 

Le mouvement cyclique, sur le marché libre du travail, du salaire “nominal” exprimé en monnaie et évalué à la journée ou à la tâche, du salaire par temps de production ou par volume de production, s’affirme alors - du moins au cours des années de crise [...] - en sens inverse de celui des prix agricoles intéressant le coût de la vie du travailleur. La tendance est commune au salaire agricole et au salaire industriel, au salaire rural et au salaire urbain.¹” Labrousse indique par ailleurs que ce “grave et lent déclin séculaire du revenu du travailleur va se compliquer des accidents de la vie cyclique. Les fluctuations du salaire par temps de travail ou par temps de consommation tendent à varier en sens inverse de celui des denrées.¹¹” 
    
    Il existe, en plus de ce cycle de longue durée de l’évolution des prix, des mouvements plus courts qui s’intercalent à l’intérieur et qui consistent en des variations saisonnières et cycliques, lesquelles interviennent notamment lors des années de mauvaise récolte (nous verrons cela en détail lors de l’article consacré à la crise). Ces mouvements saisonniers ont pour effet d’aggraver encore plus l’écart entre les prix et les salaires. Au XVIIIe siècle, cette cherté excessive provoquait le chômage, et la faiblesse des récoltes lors des mauvaises années réduisait les besoins de la paysannerie et augmentait le nombre d’individus inactifs qui allaient s’entasser dans les villes. La crise agricole entraînait alors une crise manufacturière et industrielle, et la part considérable du pain dans le budget populaire avait pour conséquence, on l’a vu un peu plus haut, de réduire drastiquement la part dédiée aux autres achats. Lorsque les ouvriers ne pouvaient plus se permettre d’acheter autre chose que du pain, les autres secteurs qui ne trouvaient plus assez de consommateurs entraient eux aussi en crise. En “période de maximum cyclique du prix des céréales, qui correspond plus généralement au maximum cyclique du coût de la vie du travailleur [en raison de la cherté excessive du pain si essentiel à l’alimentation des classes populaires], l’orientation du marché de la main-d'œuvre est à la baisse du salaire nominal, quotidien ou à la tâche. Le chômage agricole, le chômage industriel sévissent. Ils atteignent à la fois l’ouvrier industriel et la masse des journaliers vivant principalement du salaire agricole, mais aussi d’un salaire d’appoint industriel.¹²” Labrousse, en comparant la hausse du salaire nominal à celle du coût de la vie, nous montre que le salaire réel des travailleurs urbains autant que ruraux a inexorablement baissé au lieu d’augmenter. Il estime que, sur la période 1726-1741, l’écart entre le salaire et le coût de la vie est d’environ ¼ inférieur à celui qui sera enregistré pour les années du "cycle extrême" 1785-1789¹³; et si l’on tient compte des hausses cycliques et saisonnières survenues lors des années de mauvaise récolte, comme ce fut particulièrement le cas en 1788 (année de la plus grande catastrophe agricole du siècle sur laquelle il nous faudra revenir), cet écart monte à plus de 50%. Ces évolutions font donc dire à Mr Labrousse que “c’est quand le salaire nominal par temps de travail et par temps de consommation tend à baisser que le coût de la vie progresse avec violence [...]. Ainsi s’affirme la contrariété cyclique tendancielle du revenu du travailleur et du coût de la vie, qui croît en violence, toutes choses égales, à mesure que fléchit le niveau de vie considéré.¹” Les conditions de vie de cette époque portant essentiellement, comme on l’a vu un peu plus haut, sur la consommation des denrées alimentaires, alors cette période de longue durée de hausse des prix entraîna, de façon effective et concrète, une augmentation de la misère et de l’indigence au sein des classes populaires. Ces fluctuations économiques auront des conséquences très importantes pour la révolution. Il y a cette phrase qu'Albert Soboul aimait à répéter : “la faim mobilisa les sans-culottes.¹

"Economie morale des foules" en temps de crise 

    La revendication essentielle du peuple porte évidemment, on peut le comprendre au vu de ce qui vient d'être dit, sur le pain. Assurément, à la veille de la révolution, la cariatide remue sérieusement sur le plan social, en raison de la gravité de la crise économique qui les touche durement et plus encore durant les années 1788-1789. Dans certaines villes, des émeutes éclatent bien avant la révolution elle-même. En 1788, le royaume subit la crise agricole la plus violente de tout le siècle, venant alourdir considérablement les résultats d'une inflation de longue durée. Durant l’hiver de cette année, c’est irrémédiablement la disette. La mendicité augmente en raison du chômage. Les vagabonds et les mendiants s’entassent dans les villes, participeront le cas échéant aux soulèvements de la colère et de la faim menées par les foules révolutionnaires. Les 27 et 28 avril 1789 eurent lieu les émeutes Réveillon, que Soboul estime comme étant la première grande journée révolutionnaire, survenue avant celle du 14 juillet 89. Mr Réveillon était un entrepreneur qui tenait une manufacture de papier peint dans le 11e arrondissement de Paris et Mr Hanriot, lui, tenait une manufacture de salpêtre. Il se répand une rumeur dans les faubourgs selon laquelle ces deux hommes auraient dit, lors d’une réunion à l’assemblée électorale, qu’un ouvrier pouvait fort bien vivre avec seulement 15 sous par jour. En réalité, Réveillon n’avait pas dit une telle chose. Au contraire, il se plaignait du fait que certains ouvriers, en ces temps difficiles, ne touchassent que 15 sous. Seulement, en 1789, les esprits étaient échauffés par la crise, si bien que les propos de quelque patron pouvaient être facilement mal interprétés et il n’en fallait guère plus pour mettre le feu aux poudres. Les ouvriers sortirent des faubourgs et manifestèrent la journée du 27. Le lendemain, ils assaillirent les maisons de Réveillon et Hanriot et l’émeute prit de l’ampleur dans Paris. Il a fallu mobiliser la troupe qui tira sur la foule, faisant peut-être plus d’une dizaine de tués et environ une centaine de blessés. Pour l’exemple, on fit pendre haut et court, le 29 avril, deux instigateurs de l’émeute sur la place publique. Cet épisode préfigure la révolution et il est d’une très grande importance dans la conscience collective. Albert Soboul commente l’événement ainsi : “De cette première journée révolutionnaire, les motifs économiques et sociaux sont évidents; ce n’est pas une émeute politique. Les masses populaires n’avaient pas de vues bien précises sur les événements politiques. Ce furent des mobiles économiques et sociaux qui les mirent en mouvement. Mais ces émeutes populaires avaient à leur tour des conséquences politiques, ne fût-ce que d’ébranler le pouvoir.¹” 
    Le peuple en appelait au roi afin de résoudre le problème de la cherté et de la disette. Pour lui, le plus simple était de réglementer l'économie et d’appliquer avec rigueur une régulation des prix. On demandait à l'Etat d'imposer un maximum au-delà duquel les prix ne pourraient plus augmenter. Il convient de bien garder en mémoire cette revendication du maximum car elle donnera lieu à bien des débats et des confrontations passionnées durant toute la révolution. Le peuple estimait que l’Etat, en temps de crise, ne devait reculer devant rien, quitte à réquisitionner les grains et procéder à une taxation des riches. Le célèbre historien britannique Edward Palmer Thompson a forgé le concept d’économie morale des foules dans son grand livre de 1963 sur La formation de la classe ouvrière anglaise¹⁷. Il a montré, notamment dans ses travaux sur les luttes populaires aux XVIIe et XVIIIe siècles, que ces soulèvements n'étaient pas des manifestations, comme on l'a longtemps cru, de simples révoltes instinctives contre la faim. Ces émeutes frumentaires avaient en réalité une signification beaucoup plus profonde, en cela qu'elles étaient l'expression d'une certaine vision de l'économie de la part de ces foules en colère, une vision réclamant justice et égalité. Lorsque les révoltes des ventres vides éclataient, on s'emparait des grains accumulés par les marchands, notamment dans les ports, qui étaient destinés à l'exportation. Ainsi, les gens s'opposaient à la libre initiative individuelle du marchand, laquelle visait le profit et s'opérait au détriment du peuple. La foule dévalisait également les magasins, en accusant les marchands de profiter de la situation pour spéculer sur les prix. Réquisitions forcées et pillages étaient alors des actions vues par la masse révoltée comme légitimes, car pour elle, la crise n'était jamais que la distorsion d'une vie économique médiée, en temps normal, par des règles morales et éthiques. En France, en 1775, il y eut le célèbre épisode de la "guerre des farines". C'est une série d'émeutes de grande ampleur survenues dans plusieurs parties du royaume en avril et en mai, suite à une hausse importante des prix des céréales et donc, par voie de conséquence, du pain. Cette inflation fut le résultat d'une politique de libéralisation du commerce des grains par Turgot, qui était alors à la tête des finances françaises. Economiste libéral, Turgot croit en la rationalité du marché - un marché censé se réguler tout seul en dehors de toute intervention étatique - et aux vertus du libre-échange. Seulement, les mauvaises récoltes de 1773 et 1774 aboutissent à la flambée. Les révoltes éclatent et à travers elles, c'est une crise politique et sociale de grande ampleur à laquelle le pouvoir royal est confronté. Les classes populaires urbaines et rurales réclament le retour à une réglementation des prix, et elles en appellent au roi afin qu'il veille à la sécurité et à l'approvisionnement de ses sujets. Les révoltes frumentaires de 1793-1794, en plein cœur de la révolution, auront pour arrière-fond discursif cette même revendication populaire d'un juste encadrement de la vie économique. 
     L'économie morale des foules exprime, à travers les embrasements et les émeutes, une attente immédiate de justice et d'équité. Les foules - auxquelles les commentateurs de l'époque dénièrent toute possibilité d'avoir un sens réel et une vision affirmée de la politique - estiment avoir leur mot à dire sur la conduite des affaires humaines. Le concept d'E.P. Thompson, sur un plan plus philosophique, contredit la vision anthropologique des pères de l'économie politique classique, en premier lieu Adam Smith, pour qui l'homme est par nature cupide et égoïste, et que ce sont là deux traits de la nature humaine qui sont moins des vices que des moteurs de la civilisation et de toute vie en société. Le concept d'économie morale, sur un plan historique, est tout à fait d'application dans notre cas, car les masses populaires, à la veille de 89 et tout au long de la Révolution, réclament l'égalité et la justice économique. En cela, les vues égalitaires des conditions populaires sont, par essence, totalement inconciliables avec le désir de liberté économique qui s’exprime dans les rangs de la bourgeoisie. L’économie morale des foules contre le libéralisme économique et politique des possédants, voilà l’une des plus grandes oppositions qui ont structuré les événements révolutionnaires que nous verrons en lieu et place. Jean-Clément Martin, dans sa Nouvelle histoire de la Révolution française, met le doigt sur le fait que les villes sont désormais en partie structurées par des rapports conflictuels opposant les bourgeois aux classes populaires urbaines. Il indique que "l'accroissement des contradictions dans le tissu urbain" est "troué en quelque sorte par des intrusions qui font ressortir les angoisses dans les quartiers traditionnels restés à l'écart. Le monde ouvrier est singulièrement affecté par ces mouvements, mettant face à face patrons et ouvriers dans des rivalités inédites, accélérées par l'affaiblissement des corporations.¹⁸Avant que n'éclate la révolution, l'antagonisme entre les classes populaires et la bourgeoisie est bel et bien là, il est vrai à l'état larvé bien souvent, mais parfois ouvert.
   La petite plèbe, en faisant irruption sur la scène politique lors des grandes journées révolutionnaires et avec la constitution des mouvements sectionnaires et sans-culottes, a réclamé, durant la révolution, la réalisation du principe d'égalité qui était virtuellement renfermé dans les droits imprescriptibles, inaliénables et sacrés de l'homme, tels qu'ils furent énoncés dans la fameuse Déclaration des droits du 26 août 1789. En cela, elle devait fatalement s'opposer au principe bourgeois d'égalité civile par les seuls droits politiques reconnus aux citoyens. Nous aurons l'occasion de voir tout cela en détail le moment venu, mais nous vous proposons un léger avant-goût via les mots d'Albert Soboul, concernant le principe d'égalité émanant des classes populaires qui deviennent, à partir de 1789, les foules révolutionnaires. 

"De l'exigence du pain quotidien, les militants populaires dégagèrent confusément l'affirmation du droit à l'existence : il faut que tous les hommes mangent à leur faim. On ne saurait rechercher ici un système doctrinal cohérent; les revendications se précisèrent sous le poids de la nécessité. Leur unité vient de l'égalitarisme foncier qui caractérisait la mentalité et le comportement populaires : les conditions d'existence doivent être les mêmes pour tous. Au droit total de propriété générateur d'inégalité, les sans-culottes opposèrent le principe de l'égalité des jouissances : que leur importait la liberté sans l'égalité, que leur importait l'égalité politique elle-même sans l'égalité sociale..."¹⁹

"La liberté n'est qu'un vain fantôme quand une classe d'hommes peut affamer l'autre impunément. L'égalité n'est qu'un vain fantôme quand le riche, par le monopole, exerce le droit de vie et de mort sur son semblable."

Jacques Roux

1 Albert Soboul, La civilisation et la Révolution française, I/ La crise de l'Ancien Régime, Paris, Arthaud, 1970, p.275.
2 Albert Soboul, La Révolution française, Paris, Gallimard, 1982, p.75.
3 Karl Marx, Le Capital, livre I, 1867, in Oeuvres I, Economie I, Paris, Gallimard coll. La Pléiade, 1963, p.1161. Dans ce même chapitre XXV concernant la loi d'accumulation et son pendant qui est la surpopulation, Marx dit également ceci : «Dès que le régime capitaliste s'est emparé de l'agriculture, la demande de travail y diminue absolument à mesure que le capital s'y accumule. La répulsion de la force de travail n'est pas dans l'agriculture, comme en d'autres industries, compensée par une attraction supérieure. Une partie de la population des campagnes se trouve donc toujours sur le point de se convertir en population urbaine ou manufacturière, et dans l'attente de circonstances favorables à cette conversion.» Il ajoute plus loin : «...la surpopulation relative, la stagnante, appartient bien à l'armée industrielle, active, mais en même temps l'irrégularité extrême de ses occupations en fait un réservoir inépuisable de forces disponibles. Accoutumée à la misère chronique, à des conditions d'existence tout à fait précaires et honteusement inférieures au niveau normal de la classe ouvrière, elle devient la large base de branches d'exploitation spéciales où le temps de travail atteint son maximum et le taux de salaire son minimum. Le travail dit "à domicile" nous en fournit un exemple affreux.»
4 Graphique d’Ernest Labrousse repris dans Albert Soboul, La civilisation… op.cit.,  p.139.
5 Chiffres établis par R.Liris et repris par Albert Soboul, op.cit., p.131.
6 Ernest Labrousse, Esquisse du mouvement des prix et des revenus en France au XVIIIe siècle, tome II, Paris, Réimpression (réed. de 1984), p.598.
7 Ibidem, p.604.
8 Ibidem., p.599.
9 Ibidem., p.598.
10 Ibidem, p.514.
11 Ibidem, p.599.
12 Ibidem, pp. 599-600.
13 Ibidem, p.598.
14 Ibidem, p.600.
15 Albert Soboul, La Révolution… op.cit., p.79.
16 Ibidem., p.80.
17 Le concept d'E.P. Thompson apparaît une première fois dans le livre de 1963, mais de façon fort allusive. Ce n'est que par la suite que l'historien affinera sa notion dans un célèbre article de 1971 paru dans la revue Past & Present, «The moral economy of the English crowd in the eighteenth century». On peut le trouver en traduction dans le chapitre IV du livre Les usages de la coutume, traditions et résistances populaires en Angleterre aux XVII-XVIIIe siècles, Paris, EHESS, 2015.
18Jean-Clément Martin, Nouvelle histoire de la Révolution française, Paris, Perrin, 2019, p.110.
19 Albert Soboul, La Révolution française, tome II, Paris, Arthaud, 1983, p.136.

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